Le bois mort. Indispensable pour la biodiversité des forêts

Trop souvent, forestiers, administrations et jardiniers ont une obsession. Nettoyer, ramasser, éliminer, brûler tout le bois mort présent sur le sol. Branches cassées lors de tempêtes, arbres déracinés… tout doit disparaître. Or, entre la survie de nombreuses espèces d’insectes dont de nombreuses variétés utiles de coléoptères, dépend la présence de bois mort. Comment cela marche ? Voici quelques clés pour regarder les arbres morts différemment.

Première étape

Lorsque l’arbre souffre, par pénurie alimentaire, trop grande sécheresse … Il sacrifie les premières branches hautes et quelques racines. C’est pour cela que l’on s’inquiète toujours de voir la flèche d’un arbre sécher ou se déplumer. Le processus d’affaiblissement de l’arbre se met en place. Moins de sève parvient dans le cambium de l’arbre à l’endroit où la branche est sacrifiée. Et ce qui est extraordinaire, c’est que les « anticorps » qui luttent contre les attaques de champignons et autres coléoptères, les empêchant d’accéder aux sucres contenus dans la sève, baissent la garde. C’est ainsi que les premiers insectes font leur chemin. Chaque espèce a ses insectes et ce sont ces pionniers qui pénètrent l’écorce. Ils profitent du fait que les sucres présents vont durer encore quelques mois même s’ils n’alimentent plus l’arbre. Ils utilisent leurs couloirs de progression pour couper définitivement le flux de sève déjà diminué. Certains en profitent pour protéger cette sève à destination de leur progéniture, d’autres la récupèrent pour se nourrir. Conséquence, le bois meurt vite et attire alors d’autres insectes. On peut parler des Longicornes qui vont pénétrer les branches pour atteindre le cœur du bois qui par ailleurs envahi de champignons très différents les uns des autres. L’écorce commence à se décoller du cambium, offrant une cachette à de nombreux oiseaux et aux chauves-souris si utiles de nos bois. D’autres insectes comme les abeilles maçonnes ou certaines guêpes prennent place également et profitent des tunnels déjà formés. Et enfin, les Pics déboulent et font retentir les bois de leur concert de perforation. Pour eux, ce bois mort est facile à percer et idéal pour dénicher de la nourriture.

Seconde étape

La branche morte tombe sur le sol. Le tronc de l’arbre devient très facile à coloniser par les champignons et les coléoptères même si l’arbre tente encore de protéger son cœur. Lorsque ce dernier est trop endommagé, les pics, les chauve-souris y installent leur nid. Les mouches, et autres coléoptères se gavent de tous les nutriments enfin accessibles. Tout un monde de vers, d’acariens qui profitent les uns des autres pour se nourrir de l’arbre et son cœur enfin accessibles. Leurs larves digèrent le bois de cœur jusqu’à l’aubier. L’aubier, construit à partir du cambium, est de plus en plus dure au fur et à mesure du temps. C’est ce bois de cœur dur qui fait que l’arbre est raide et solide. Au cœur de l’arbre se développe une matière étonnante faite de déjections des animaux présents, des matériaux de nidification décomposés, …Cette sorte de boue est particulièrement riche en azote, et l’arbre en profite pour poursuivre son développement malgré ses blessures… On a pu constater la croissance des racines dans des arbres creux au cœur très dégradé.

Dernière étape

L’arbre n’est pas encore tombé. L’humidité du sol fait que les champignons se développent rapidement au pied. Il s’affaiblit alors irrémédiablement. Les amphibiens profitent de cette humidité pour développer leur habitat. Lorsque l’arbre tombe, il peut même créer une sorte de bassin naturel favorable aux plantes aquatiques, aux mousses et aux amphibiens. Un arbre tombé peut aussi offrir un passage sûr à des insectes ou des petits mammifères qui vont pouvoir évoluer en toute sécurité d’une zone à l’autre de la forêt sans devoir partager le chemin avec d’éventuels ennemis. Lorsque l’arbre est à terre depuis des mois, les champignons sous toutes leurs formes s’installent sur le bois mort. Des larves d’insectes y prospèrent également, tout comme certains habitants des bois comme les serpents. Ils profitent des armées de fourmis, et autres cloportes et mille-pattes qui traitent le bois restant. Le sol s’enrichit alors des éléments nutritifs restant et non consommés par les insectes ainsi que de leurs déjections. Tout ce carbone et ces éléments contribuent à nourrir la végétation alentour. Et détail qui n’est pas sans conséquence pour la forêt, les brouteurs des bois, les chevreuils et les cerfs, ne viendront pas dévorer nouveaux départs de végétation car ils craignent de rencontrer dans ces taillis opaques renards ou loups. Le cycle vertueux de la nature peut se poursuivre. Les nouveaux « petits » arbres peuvent ainsi se développer sans risquer une taille précoce.

Regardons les arbres morts différemment, apprivoisons-les et surtout acceptons-les dans nos jardins, dans nos parcs, dans nos forêts .

Tronc d’arbres morts colonisés par des champignons

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