Francis Hallé, la science au service de l’arbre

Le 25 décembre 2019, en guise de cadeau de Noël aux auditeurs, le botaniste et biologiste Francis Hallé accordait un « Grand entretien » à France Culture, dans le cadre de l’émission « La méthode scientifique ». Au journaliste qui lui demandait en guise d’introduction quelle était justement sa méthode de travail, il répondit : « Je n’ai aucune méthode. Il faut être totalement opportuniste dans les observations et la curiosité, une méthode ça ne marche pas, car vous tombez tout le temps sur des choses totalement imprévues ! ».

Francis Hallé, en 2013• Crédits : Thomas SAMSON – AFP

C’est sans doute cette curiosité, née des émerveillements de son enfance et associée à une immense culture scientifique, qui a guidé le très inspirant parcours de Francis Hallé. Nous vous invitons aujourd’hui à vous laisser gagner par cette même curiosité pour découvrir l’homme et l’œuvre…

Une vocation de botaniste qui prend racine dans le terreau de l’enfance

Un père agronome, une mère passionnée d’art, d’histoire, de poésie, et qui « adorait les plantes », un frère aîné qui deviendra botaniste au Museum d’Histoire Naturelle de Paris, plus largement une famille de voyageurs, médecins et artistes peintres, ouverte à la diversité des cultures et des pays : voilà plantés les personnages qui ont accompagné la croissance de Francis Hallé. Ajoutons-y une enfance passée pendant la guerre de 40 sur une petite propriété agricole aux confins de la forêt de Fontainebleau, et nous commençons à comprendre comment a pu naître chez lui une admiration et même une passion pour la botanique, les arbres et la forêt.

S’ensuit un impressionnant curriculum universitaire et professionnel : études de biologie ; doctorats en biologie et en botanique ; diplôme de l’université d’Abidjan ; poste de professeur de botanique à l’université de Montpellier ; spécialisation dans l’écologie des forêts tropicales humides ; longs séjours en Côte d’Ivoire, au Congo, au Zaïre, en Indonésie pour y étudier les forêts primaires ; passion pour l’étude de l’architecture des plantes vasculaires…

L’exposition Francis Hallé à Montréal, édition 2017

Un fervent défenseur des arbres et des forêts primaires

Francis Hallé le clame haut et fort, il a un ennemi, le philosophe grec Aristote qui soutenait que les plantes constituaient une forme de vie inférieure car elles ne marchaient pas et ne parlaient pas. Aberrant selon lui, l’homme pourrait se passer à la rigueur des animaux, mais en aucun cas des plantes et encore moins des arbres qui ont beaucoup à lui apporter et lui apprendre ! Renverser ce mépris au profit d’un respect, d’une admiration voire d’un amour pour les arbres est en quelque sorte la mission que s’est fixée Francis Hallé.

Radeau des cimes de l’opération Canopée

Et il s’en est donné les moyens. Parmi ses plus belles réalisations, dans les années 80, le « Radeau des cimes », une installation suspendue au-dessus de la canopée, où la biodiversité est plus riche que dans toutes autres strates de la forêt tropicale humide. L’objectif : observer et étudier au plus près le « sommet mondial de la biodiversité », et alerter sur les menaces qui le concernent, notamment les dégradations causées par l’homme. De 1986 à 2003, Francis Hallé a dirigé lui-même les missions du Radeau des cimes qui rassemblent des scientifiques de toutes les disciplines liées à l’éco-système forestier : botanique et ethnobotanique, pharmacologie, entomologie, mammalogie, herpétologie, ornithologie, virologie, médecine et climatologie.

Francis Hallé dans le film Il Etait Une Forêt de Luc Jacquet
Francis Hallé dans le film Il Etait Une Forêt de Luc Jacquet (2012)

A l’actif de Francis Hallé également, des ouvrages illustrés de schémas explicatifs visant à mieux faire connaître les plantes et les arbres comme Eloge de la plante en 1999, ou Plaidoyer pour l’arbre en 2005 ; ou encore, en 2013, la collaboration avec Luc Jacquet et l’association Wild Touch pour le film Il était une forêt, sur les dernières grandes forêts du monde et les dangers qui les guettent. Sans oublier la participation à de multiples conférences et colloques sur le sujet.

Recréer la forêt primaire, le projet d’une vie

Au fil des ans, Francis Hallé a acquis une double conviction : n’ayant jamais été ni défrichée, ni exploitée, ni modifiée par l’homme, la forêt primaire détient des atouts inestimables pour la survie de l’Homme et de la planète (captation du CO2, régulation du climat, réserve de biodiversité, reconstitution des ressources hydriques…) ; et tenter de la recréer n’est pas une utopie, mais plutôt une nécessité, surtout si l’on sait qu’elle ne représente plus aujourd’hui que 5 à 10 % des forêts !

La forêt primaire détient des atouts inestimables pour la survie de l’Homme et de la planète

Francis Hallé

C’est ainsi qu’en 2019, il se lance et crée l’ « Association Francis Hallé pour la Forêt Primaire » qui « agit pour la création d’un vaste espace de dimension européenne et de grande superficie – environ 70 000 hectares – dans lequel une forêt intacte évoluera de façon autonome, renouvelant et développant sa faune et sa flore sans aucune intervention humaine, et cela sur une période de plusieurs siècles ». Le projet, qui entre dans les objectifs du « Pacte vert » européen visant à instaurer la protection de 30 % des terres d’ici à 2030, a reçu un très bon accueil de la Commission européenne. Et l’UE pourrait participer à une aide juridique pour la création de cet espace et pour le financement actuellement estimé à 300 000 euros.

La forêt amazonienne, une des dernières forêts primaires au monde.

Reste à trouver l’emplacement idéal, comme l’expliquait en juin 2020 Francis Hallé au Good Planet’mag : « Plusieurs endroits ont été évoqués entre la France et l’Allemagne, la France et la Suisse ou même la France et l’Espagne, mais les zones montagneuses m’intéressent moins car c’est une forêt de plaine que je voudrais voir revivre, comme celles que nos ancêtres ont exploitées puis détruites pour installer élevage et agriculture. Il nous faut 60 0000 à 70 000 hectares, ce qui est assez peu finalement, à peine la superficie de l’île de Minorque en Méditerranée ».

Le caractère totalement innovant du projet de Francis Hallé est bien sûr qu’il s’étend sur plusieurs siècles (il faut 1000 ans si l’on part d’un sol nu !), et à cet égard sa démarche se veut, une forme de réparation et un don aux générations futures. Comme Wangari Maathai, comme Sebastiao Salgado, Francis Hallé est certes un grand amoureux des arbres, mais avant tout un humaniste et un altruiste. #inspirations   

à découvrir

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COMMENTAIRES

  1. Bonjour Rosemary,

    Nous n’avons malheureusement pas l’expérience pour vous conseiller concernant les robiniers faux acacias. Nous vous conseillons de vous tourner vers des spécialistes pour limiter les erreurs !

    Nous vous souhaitons une excellente semaine,

    Louis

  2. C est une question : que faites vous des invsifs comme il y a chez moi de beau robiniers faux accacia nombre +20 diametre 30 à 50 cm haut de 20m .je vois qu ils empechent la diversité ..autour il y a prairie et bois 16 hectares j ai la chance d habiter lá, et d avoir 1 année sur 4 du bon miel d accacia
    Rosemary Laneau à kortenberg

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