Gilles Gautier a toujours été fasciné par l’incroyable destinée d’Elzéard Bouffier, ce berger imaginé par Giono qui fait revivre sa région de Haute-Provence, entre 1913 et 1947, en y plantant seul des hectares d’arbres. Giono disait avoir composé cette nouvelle pour « faire aimer à planter des arbres », selon ses termes. Mission accomplie de toute évidence.
A priori, rien ne prédestinait Gilles Gautier à consacrer sa vie au reboisement de la vallée du Tsaranoro à Madagascar. Et pourtant, lorsqu’on suit son parcours, on y trouve une grande cohérence entre sa passion pour l’escalade, son amour viscéral de la nature et sa volonté de participer activement à sa protection, sa restauration et son embellissement.
Mettons nos pas dans ceux de ce grand marcheur et découvrons comment au fil des années, il a planté plus de 700 000 arbres et ainsi contribué à transformer et redynamiser les paysages et la vie d’une vallée très abîmée par la déforestation et jusque-là coupée du monde
De Marseille à Madagascar, la longue marche d’un grimpeur passionné
Début des années 80, Gilles Gautier est un jeune marseillais passionné de montagne et attiré par l’aventure au long cours. Il décide de traverser l’Afrique à pied, s’installe pour un temps aux Comores, poursuit son périple vers Madagascar. C’est alors qu’il découvre la vallée du Tsaranoro, située à 3 heures de Fianarantsoa dans le sud de l’Île. Une merveille dominée par les montagnes et les falaises, un territoire vierge, somptueux, coupé du monde, un paradis pour les grimpeurs.
Gilles Gautier n’est pas qu’un sportif aguerri, c’est aussi un homme qui vit en profonde harmonie avec la nature et les hommes qui l’habitent. C’est ainsi qu’il apprend à connaître cette vallée qui devient sa nouvelle demeure, qu’il en comprend les besoins, qu’il décide de contribuer activement à sa revitalisation.
Retrouver le caractère sacré de la forêt
Dans la vallée du Tsaranoro, les Malgaches pratiquent depuis des générations la culture sur brûlis qui consiste à mettre systématiquement le feu à la terre afin que les zébus aient de jeunes pousses d’herbe à manger rapidement. C’est le seul moyen qu’ils ont pour régénérer efficacement les sols. Pourtant, à plus long terme, cette méthode est catastrophique car elle limite radicalement la croissance des végétaux et empêche les arbres de devenir « des arbres ». Résultat : la biodiversité animale et végétale a disparu, la terre est épuisée, l’érosion ravine les sols, et la survie des populations repose uniquement sur les zébus et le riz.
Gilles Gautier décide de mettre ses pas dans ceux des anciens, qui avaient une grande connaissance du milieu naturel, et pour qui la forêt était instinctivement « sacrée ». Il se lance dans le reboisement de la vallée.
700 000 arbres plantés : un projet de reboisement au long cours
Depuis 2004, entouré d’une équipe de villageois acquis à sa démarche, Gilles Gautier plante des arbres. Inlassablement et en dépit des difficultés et des échecs. Sa méthode ? A la saison des pluies, enterrer des pousses et des boulettes de terre mêlée à de la bouse de zébu. Puis laisser faire la nature. Les plantations sont parfois à des heures de marche, impossible donc d’arroser, les arbres mourront ou survivront. Résultat : 15 à 20% de rendement.
Aujourd’hui, sur les 700 000 arbres plantés, 200 000 vivent et croissent. Et la vallée est transformée : les animaux (faucons pèlerins, lézards, caméléons et pigeons verts) sont revenus. Les eucalyptus (qui ont le mérite de fournir rapidement du bois de chauffage), les acacias, les orangers et citronniers prospèrent. L’érosion des sols diminue. Les terres sont mieux valorisées par les agriculteurs. La vallée est redevenue verdoyante et ombragée.
La volonté de transmettre son amour des arbres aux générations futures
Si Gilles Gautier s’est lancé avec tant d’ardeur dans ce projet de plantation d’arbres, c’est qu’il est littéralement tombé amoureux de la vallée, de ses habitants et de leur art de vivre, simple et heureux. Son souhait le plus cher est de redonner à la vallée son rayonnement, de donner aux jeunes l’envie d’y rester, de leur montrer qu’une belle vie y est possible, de les inciter à poursuivre son œuvre de reboisement.
Transmettre donc. D’où la création d’une association (aujourd’hui inactive) visant à reboiser et protéger la vallée, d’où aussi l’ouverture de sa pépinière à tous les habitants souhaitant à leur tour planter des arbres, d’où enfin sa volonté d’accueillir régulièrement des enfants pour leur communiquer son savoir et sa passion. Dans les écoles malgaches, deux jours par an sont consacrés à la protection de l’environnement, et dans la vallée du Tsaranoro, l’école est « verte », c’est à dire résolument tournée vers la nature et l’écologie. Chaque année, au moment où la pluie arrive Gilles Gautier invite les enfants à venir planter des arbres avec lui. En espérant qu’à l’âge adulte ils continuent…
Notre planteur d’arbres n’a pas pour autant abandonné sa passion pour l’escalade. Il a ouvert un lodge qui accueille les randonneurs au pied des falaises du Tsaranoro. Cette initiative contribue aussi à redynamiser la vallée, d’autant qu’une partie des bénéfices du camp sert au dispensaire, à l’école, à ramener l’eau et l’électricité dans les villages.
Nous laisserons le dernier mot à Gilles Gautier, qui avoue : « Je crois que j’étais prédestiné à vivre dans cette vallée » ! #inspirations
Magnifique prouesse d’amour,de perseverance de cette homme merci et bravo à lui ,cela donne envie de le copier