En 1972, Maxime Le Forestier chantait la complainte de l’arbre dans la ville, né dans le béton, coincé entre deux maisons, et ayant la fumée des usines comme prison. Cinquante ans plus tard, son arbre se sentirait moins seul et retrouverait certainement la joie de vivre en voyant combien la végétalisation de la ville est devenu un sujet d’actualité.
Alors qu’en est-il de cette frénésie de plantation d’arbres, lubie de bobos, greenwashing politique ou réel enjeu pour la survie des citadins ?
Une surenchère (un délire ?) de promesses électorales
Les élections municipales de 2020 ont donné lieu aux quatre coins de France, et toutes sensibilités politiques confondues, à un déferlement de propositions plus ou moins réalistes, que l’on pourrait rassembler sous la bannière de cette superbe déclaration de Pierre Cuny, candidat à la Mairie de Thionville : « Chaque habitant doit pouvoir apercevoir un arbre depuis son logement ». C’est ainsi qu’Anne Hidalgo a promis de planter 170 000 arbres en 6 ans à Paris, que Benjamin Griveaux a envisagé de déplacer la Gare de l’Est pour y implanter un Central Park parisien, que, plus ambitieux encore, Etienne Blanc, le candidat LR de Lyon, a annoncé unplan de 500.000 arbres et arbustes, l’objectif étant qu’au final la ville compte autant d’arbres que d’habitants ! Détail amusant, et geste symbolique fort, la plupart des candidats promettent qu’à chaque naissance d’un bébé dans la ville, un arbre sera planté.
L’arbre en ville : une ressource écologique essentielle
Qui dit promesse électorale, dit réponse à une demande des électeurs. Mais alors, quels bienfaits les citadins attendent-ils de cette entreprise d’arborisation urbaine ? Petit point sur les pouvoirs attribués à l’arbre en ville :
- Les arbres sont d’excellents climatiseurs : et c’est une bonne nouvelle avec le réchauffement climatique qui fait grimper de plusieurs degrés la température des villes l’été ! Grâce à son feuillage, l’arbre bloque une partie des rayons du soleil qui sinon se transformeraient en chaleur sur les surfaces minéralisées (les fameux îlots de chaleur), fait de l’ombre, et produit de la vapeur d’eau dans l’atmosphère (phénomène d’évatranspiration) ce qui augmente le taux d’humidité et diminue la température.
- Les arbres purifient l’air : grâce à la photosynthèse, ils produisent et libèrent dans l’atmosphère de grandes quantités d’oxygène. A titre indicatif, un arbre mature produit en moyenne 120 kg d’oxygène par an, soit la moitié de la consommation annuelle d’un adulte.
- Les arbres sont des puits de carbone : plus ils sont jeunes, plus grandes sont quantités de CO2 atmosphère qu’ils absorbent, stockent et transforment en biomasse végétale.
- ils filtrent l’air, en absorbant quantité de gaz polluants et de particules fines.
- Et contribuent à préserver la biodiversité en ville, car leur écosystème est idéal pour accueillir et retenir les oiseaux et les petits mammifères.
Reconnecter le citadin à la nature et accroître son bien-être
Au-delà de sa fonction écologique, l’arbre en ville, qui reconnecte le citadin à la nature, a un impact positif sur l’équilibre et le bien-être physique et mental, et donc sur la vie en société, comme le souligne Jordy Stefan, docteur en psychologie, spécialiste de l’influence de la nature sur les comportements sociaux : « La vue de la nature a un effet sur la baisse de l’anxiété et du stress (…) En présence de nature les gens ont tendance à être plus tournés vers les autres, il y a moins de tensions. Une étude montre, par exemple, qu’il y a moins d’actes de vandalisme dans un square arboré que dans un square bétonné ».
Conclusion
La réintroduction massive des arbres dans la ville serait donc la solution miracle à tous nos problèmes écologiques, climatiques, sociétaux et psychologiques ? Une partie de la solution sûrement, à condition bien sûr que les actions de communication opportuniste ne l’emportent pas sur le sérieux des ambitions à long terme, à condition aussi, disent les plus militants, que les habitants soient pleinement engagés dans la démarche.