Impossible, en parlant du bouleau, de ne pas revivre l’arrivée du Docteur Jivago et de sa famille dans leur retraite forcée de Varykino au fin fond de l’Oural, tant la splendeur des bouleaux participe de la magie de cette épopée… Impossible aussi de ne pas évoquer le célèbre tableau de Klimt, « La forêt de bouleaux ». Intéressant d’ailleurs de noter que le bouleau figure aujourd’hui parmi les décors les plus prisés des papiers peints panoramiques comme si l’idée d’abriter notre home sweet home au cœur d’une futaie de bouleaux devait nous apporter protection et sérénité. Mais d’où vient notre attirance pour cet arbre dont l’apparente sobriété regorge de bienfaits ?
Élégant, adaptable, frugal, robuste, rustique et pionnier : le bouleau a toutes les qualités !
De la famille des Bétulacées, le bouleau est aussi connu sous son nom scientifique : Betula. Arbre très commun, qui fleurit d’avril à mai, il se distingue par son écorce claire, sa silhouette gracile et son feuillage léger qui filtre la lumière sans la bloquer, coloré de teintes vert clair au printemps et jaune à l’automne. Il est d’une espèce frugale qui n’a pas besoin d’un sol riche pour s’épanouir, il pousse vite, même dans les substrats les plus pauvres, et jusqu’à 2000 mètres d’altitude. Il préfère le soleil, mais n’aura pas de difficulté à pousser dans un endroit mi-ombragé. C’est un arbre robuste et rustique, qui résiste aux maladies et qui supporte bien le froid. Souple et léger, il est capable de plier sans rompre en cas de tempête ou de chutes de neige.
Le bouleau est donc un bel arbre d’ornement pour tous les types de jardin, qu’on le préfère en sujet isolé, par groupes de trois ou quatre, ou en alignement pour accentuer la verticalité de la perspective. En climat tempéré, le bouleau arrive à maturité au bout d’une quinzaine d’années, mais plus au nord (Suède, Finlande, Russie…) il peut vivre jusqu’à 100 ans et plus.
Particularité remarquable, le bouleau est une plante pionnière, c’est à dire qu’il est le premier à coloniser les espaces ouverts comme les landes et les clairières, après une tempête ou un incendie par exemple. Ce faisant, il freine l’érosion des sols et fournit de l’ombre aux espèces qui ne peuvent grandir en étant trop exposées à la lumière. C’est donc souvent lui qui crée la forêt, au risque de se laisser parfois dépasser par l’ombre des plus grands arbres.
On rencontre de nombreuses espèces de bouleaux en Asie et en Amérique du Nord, quatre plus particulièrement en Europe, dont deux largement répandues : le bouleau verruqueux (Betula pendula), le bouleau pubescent, (Betula pubescens), et deux arbrisseaux des régions arctiques : le bouleau nain (Betula nana) et le bouleau peu élevé (Betula humilis).
Une écorce aux multiples usages
Au-delà de ses qualités esthétiques et écologiques, le bouleau a de tout temps rendu bien des services à l’homme. Preuves en sont deux objets datant de 5000 ans que l’on a retrouvé sur l’homme de glace préhistorique Ötzi, un panier en écorce de bouleau et une hache en cuivre attachée à son manche en bois avec de la poix de bouleau, sorte de goudron produit à partir de l’écorce chauffée. Comme lui, les Amérindiens et les peuplades de la Sibérie, de la Russie et de l’Asie centrale utilisaient cette poix pour colmater les coques de leurs embarcations, ils prenaient de l’écorce de bouleau pour fabriquer des canots et toutes sortes de contenants, ils en tapissaient leurs garde-mangers pour préserver plus longtemps les aliments, ils l’utilisaient même mouillée pour allumer le feu après la pluie, ou s’en servaient de doublure dans les chaussures pour se prémunir de l’humidité.
Déguster la substantifique moelle du bouleau
Oui, car il y a aussi à boire et à manger dans le bouleau ! Le bois d’abord, qui, réduit en bouillie, était en Scandinavie incorporé à de la farine pour fabriquer du pain. L’écorce interne, qui était consommée avec des esturgeons en Sibérie, l’écorce de bouleau à papier dont les Amérindiens appréciaient le goût sucré, l’écorce de la racine du bouleau à papier dont on faisait un substitut de thé. La sève bien sûr qui pouvait remplacer celle de l’érable pour fabriquer du sirop. Sans oublier le jus de bouleau qui fut une boisson très prisée en Russie soviétique, puisque, pour un coût de production très faible, elle procurait en abondance des vitamines B6 et B12, et étanchait très bien la soif.
Un arbre bien connu de la pharmacopée traditionnelle
Parmi les bienfaits reconnus du bouleau, on peut encore évoquer la tradition qui veut qu’au sortir du banya (sauna) ou lorsqu’ils se jettent dans un trou d’eau gelée pendant la période des fêtes, les Russes se fouettent avec des feuilles de bouleau, pour détoxifier et revitaliser leur peau et stimuler la circulation sanguine. Les différents éléments du bouleau (écorce, sève, jus…), qu’ils soient utilisés sous forme d’huiles essentielles, d’infusions ou de sirops, sont réputés avoir de multiples vertus thérapeutiques : soins de la toux, vertus diurétiques, digestives et détoxifiantes pour les reins, action contre les cellules cancéreuses, traitement de la chute des cheveux, soulagement de l’arthrite, traitement de la cystite, propriétés antiseptiques, anti-inflammatoires, antalgiques…
Rien d’étonnant pour conclure, tant il regorge de trésors, que le bouleau ait fait l’objet d’un véritable culte chez les Amérindiens comme chez les peuples scandinaves, sibériens ou russes. La tradition de planter un bouleau devant sa maison demeure d’ailleurs encore dans la Russie contemporaine. A l’Arboretum de Boiscorde, vous pourrez admirer des bouleaux jaunes (Betula alleghaniensis et Betula lutea) conduits à partir de semis collectés au Canada où ils poussent depuis le Sud-Est du Manitoba jusque dans les provinces Atlantiques et dans le Nord-Est des États-Unis. Ce sont de grands arbres, qui se distinguent par la jolie couleur dorée de leur écorce, et qui peuvent vivre jusqu’à 150 ans, parfois plus. Ce sont aussi des arbres, dont les principes actifs peuvent agir très efficacement sur la peau, nous vous en reparlerons très bientôt.