Curieusement, c’est le même mot latin, « gemmae », qui désigne la pierre précieuse et le bourgeon. Le bourgeon traverse-t’il l’hiver en devenant dur comme une pierre jusqu’à son éclosion à l’arrivée du printemps ou est-il vraiment une pierre précieuse, un joyau ? Sans doute, si l’on en croit les spécialistes et les adeptes de la gemmothérapie, une médecine naturelle plus simplement appelée médecine des bourgeons. Le printemps approche, c’est le moment de découvrir l’action bénéfique des tissus embryonnaires végétaux sur le bien-être et la santé.
Petite histoire de la gemmothérapie, une branche de la phytothérapie
Comme bien souvent il faut remonter au Moyen-Âge, et aux alchimistes, pour trouver les premiers textes évoquant l’usage des bourgeons en médecine, avec la mention d’une pommade aux bourgeons de peuplier, l’« Unguentum populeum », utilisée encore aujourd’hui pour traiter les hémorroïdes.
C’est ensuite Ste Hildegarde de Bingen, une religieuse du XIIème siècle, considérée comme l’ancêtre visionnaire des naturopathes, qui parle la première des vertus thérapeutiques des bourgeons, insistant sur leurs qualités bien supérieures selon ses observations à celles des végétaux arrivés à maturation. Dans le « Livre des subtilités des créatures divines », elle recommande l’utilisation de huit bourgeons d’arbres, les bourgeons du bouleau, du cassis, du châtaignier, de l’églantier, du frêne, du peuplier, du pommier et du tilleul.
Le philosophe botaniste allemand Goethe (oui, le grand Goethe !) s’empare à son tour du sujet dans son ouvrage de référence « La métamorphose des plantes », en explorant le rôle central du bourgeon. Peu après, Samuel Hahnemann, médecin et inventeur de l’homéopathie, met au point le procédé de dilution des macérât-mères, fondamentaux en gemmothérapie.
Enfin, plus près de nous, le Dr Pol Henry, un médecin belge, mène dans les années 60 des études cliniques qui révèlent les bienfaits des bourgeons, donnant ainsi naissance à une branche de la phytothérapie qu’il appelle la «phytoembryothérapie», la thérapie par les embryons de plantes. Il est rapidement suivi dans sa démarche par le Dr Max Tétau, qui lui, parle plutôt de «gemmothérapie», et qui donne réellement son essor à cette médecine des bourgeons.
A ce jour, la gemmothérapie n’a fait l’objet d’aucune étude randomisée en double aveugle, seule méthode reconnue comme fiable par l’Ordre des médecins et n’a pas fait non plus l’objet de publications scientifiques dans des revues à comité de lecture reconnues. Pour autant, les études menées par les docteurs Pol Henry et Max Tétau, ainsi que les données empiriques démontrent largement l’action bénéfique des tissus embryonnaires végétaux sur le bien-être et la santé.
La gemmothérapie, comment ça marche ?
La médecine des bourgeons repose sur un principe qui paraît évident une fois qu’il est énoncé : les tissus embryonnaires des bourgeons contiennent toute la plante en devenir (feuilles, fleurs, tiges…), tout le patrimoine génétique de la future plante, toute l’énergie vitale et les principes actifs nécessaires à son développement – acides nucléiques, acides aminés, phyto-hormones (auxine, gibbérelline), oligo-éléments, minéraux, vitamines et sève, dont une partie disparaît lorsque la plante arrive à maturité. Ils détiennent donc des propriétés thérapeutiques différentes voire renforcées par rapport à celles des plantes arrivées à maturité.
Les bourgeons sont récoltés au printemps, puis les extraits de bourgeons sont utilisés sous forme de « macérat » obtenus après trois semaines de macération des tissus embryonnaires dans un solvant composé d’1/3 d’eau, 1/3 de glycérine et 1/3 d’alcool.
Il existe deux formes de macérats de bourgeons :
– La forme phytothérapeutique : le macérât-mère, appelé aussi macérât concentré car on ne le dilue pas. Il n’est pas reconnu par la Pharmacopée, mais considéré comme un complément alimentaire à base de plantes ;
– La forme homéopathique : macérât dilué au 1DH (dilué 10 fois), reconnu par la Pharmacopée.
Que soigne la médecine des bourgeons ?
La gemmothérapie est plutôt utilisée de façon préventive que curative, sous forme de traitement de fond sur quelques semaines. Le macérat de bourgeons agit en profondeur, en rééquilibrant certains processus physiologiques déréglés. A cet égard, la médecine des bourgeons est particulièrement efficace et recommandée pour les affections chroniques.
Le bourgeon de cassis soulage les douleurs articulaires, grâce à son action anti-inflammatoire ; le bourgeon de myrtillier, riche en polyphénols et autres antioxydants, favorise la microcirculation au niveau de la rétine et contribue à retarder les risques de DMLA (dégénérescence maculaire liée à l’âge), de glaucome ou de cataracte ; le bourgeon de gingko biloba booste la mémoire ; le bourgeon de chêne a une action tonique, en particulier sur la sexualité ; le bourgeon d’églantier ravive les défenses immunitaires, stimule l’organisme et offre une bonne source de Vitamine C ; le bourgeon de cèdre a une action cicatrisante et régénérante des tissus ; le bourgeon de hêtre répare les chocs et les traumas psychiques ; le bourgeon de tilleul a un effet calmant et apaisant… On trouvera tous ces extraits de bourgeons, et bien d’autres, sous forme de macérats vendus en pharmacies ou parapharmacies.
Vous vous dites peut-être qu’au fond vous pourriez préparer vous-même votre macérat de bourgeons. Et vous avez raison, c’est assez simple, à condition de respecter certaines règles élémentaires. Vous trouverez sur Internet de multiples tutos qui vous guideront dans votre apprentissage, lancez-vous !
Pour en savoir plus :
Boistard, S. (2016). Gemmothérapie – Les bourgeons au service de la santé – Guide pratique et familial. Éditions de Terran.
Ledoux, F., & Guéniot, G. (2014). La phytembryothérapie : L’embryon de la gemmothérapie. Éditions Amyris.
Andrianne, P. (2011). Traité de gemmothérapie : La thérapeutique par les bourgeons. Éditions Amyris.